Le temps était pourtant au beau fixe en ce jour de désarroi. De réel désarroi pour Nicotine. Cette blessure, tant refoulée durant ces quelques années, n’avait cessé ; elle ne cesserait surement jamais. Il fallait vivre ainsi. La perte d’un être cher est toujours dur, et même pire : elle est irrévocable. Autant, lorsqu’une histoire d’amour se termine, rien ne vous dit que vous ne recroiserez pas cette personne, tant aimé et tant haït à la fois, et qu’un jour, vous fonderez une famille avec, que l’amour renaitrait de ses cendres. Personne ne sait. Excepté la Mort. Cette grande faucheuse, associée aux sœurs Parques, dans la mythologie grec, qui tissent et coupent les fils de nos vies. Quel rôle ingrat, et convoité à la fois. Avoir droit de vie ou de mort sur les êtres humains. Un homme dans le groupe des Good Pulse avait un don semblable. Oui, un don qui lui permettait de tuer à volonté. Mais, grâce au Ciel, ce jeune homme était doté d’une grande lucidité, et d’une profonde réflexion, qui l’empêchait d’utiliser son pouvoir à tout-va. C’est une grande responsabilité, que d’avoir un don. Même pour Nicotine, cela était dur, car elle se devait de ne pas trop fouiller dans la mémoire des gens l’entourant. Oui, connaître les moindres secrets, c’est bien, mais les avoirs illégalement, c’est mal. Elle s’empêchait de trop tortiller la mémoire du jeune homme avec elle, autant qu’elle le pouvait ; mais le pauvre n’avait pas eu une vie si simple que ça. Non, il n’avait pas hérité d’une grande fortune hollywoodienne comme elle, il n’avait jamais eu de vie de famille comme elle avait pu en avoir. Elle le regardait, avec une certaine tendresse car le jeune homme avait beaucoup de mérite. « Pas vraiment, enfin, je n’ai plus vraiment de famille, mais enfin. Comment vous expliquer ? C’est assez long, et assez compliqué. Si vous avez le temps, on pourrait en discuter autour d’un chocolat ? ». Un chocolat ? En ce moment, Nicotine aurait bien plus besoin d’une vodka tonic que d’un simple chocolat. Elle voulait accepter l’invitation du jeune homme, mais une seule chose l’en empêcher : sa tenue, trop conventionnelle pour se pavaner en ville. La jeune fille eut un temps de latence. Ils étaient arrivés au point culminant du cimetière : une toute petite colline, surélevée de quelques demi-douzaines de mètres, mais qui était assez claire et défrichée pour qu’on puisse voir le ciel entre les branches sans feuilles des micocouliers. Il était bleu, bleu azur en ce si beau jour. Quel horreur pour Nicotine, que d’avoir à supporter cette chaleur, et cette gaieté l’entourant. Il ne fallait pas se voiler la face : tout le monde était heureux aujourd’hui, car, en plein milieu de l’automne, il faisait aussi chaud qu’en été. Mais cela n’intéresser pas vraiment la jolie brune. A vrai dire, elle médisait la totalité les gens qui étaient heureux en ce o3 Octobre. Après un long moment de réflexion, la jeune fille répondit à la requête de Tim :« Allons plutôt chez moi, s’il n’y a pas de problème. Je me sentirai mal à l’aise dans un café, vêtu de cette tenue, et avec un jeune homme plus jeune que moi. N’y vois aucune offense, c’est juste que … On risquerait de me le reprocher. ». Oui, elle venait bien de lui proposer d’aller chez elle, et oui elle le tutoyait. 2 grands pas dans leur supposé relation, dont Nicotine ne perdait pas le film conducteur : le rallier à sa cause. Bien évidemment, les pensées du jeune homme à son égard ne lui avais pas échappée : il la trouvait belle et très attirante. Le jeu en était presque trop simple, mais il fallait faire avec. Qui sait ? Peut-être serait-il plus hostile une fois le palier de sa maison franchi ! Elle se tourna légèrement vers lui, et lui fit un sourire malicieux et doux. Elle tentait, oui, d’instaurer une certaine complicité entre eux, pour le mettre en confiance. Il ne faut quand même pas oublier qu’il se connaisse depuis maintenant une quarantaine de minutes, à peine. Cela est d’ailleurs choquant, quand on y pense réellement.